Valence, réquisitoire pour un massacre 4 : La prédation 2030

Quatrième volet de notre dossier. Par inconscience ou duplicité, les autorités font tout pour qu’une catastrophe naturelle devienne une opportunité de coercition des masses. La récente tragédie de Valence en est un cas d’école, un laboratoire d’ingénierie sociale à l’échelle d’une région d’un pays d’Europe. Dans ce dernier chapitre, nous voyons comment le drame est une opportunité pour la prédation capitaliste et accélère le reformatage de la ville. Une restructuration selon les normes de l’Agenda 2030 de l’ONU, soit un lieu de résidence en liberté surveillée et limitée. La guerre contre les peuples s’intensifie.

Le capitalisme du désastre

Que ce désastre ait été sciemment provoqué ou soit la conjonction d’une corruption multiple et d’une incompétence crasse des autorités, le trauma infligé à la population nous rappelle la Théorie du choc de Naomi Klein (2008).

Si on vous frappe, un grand coup, vous serez dans un tel état de choc que vous vous défendrez mal contre un reconditionnement mental. Ainsi, un traumatisme fondateur, régressif, par exemple une crise économique, sanitaire, une catastrophe naturelle, permet à un intervenant extérieur d’agir brutalement, de changer la donne à grande échelle et de faire en sorte que ces bouleversements soient irréversibles. Comment ? Avec ce que Naomi Klein nomme le capitalisme du désastre.

On le voit rapidement venir avec l’annonce de l’arrivée de Palantir Technologies et sa filiale espagnole, une entreprise américaine spécialisée dans l’analyse de données massives (big data) et l’intelligence artificielle connue pour ses collaborations controversées avec les gouvernements, les agences de renseignement et les militaires. Accusée de favoriser la surveillance de masse et l’opacité algorithmique*, notamment lors de précédentes catastrophes (par exemple les ouragans de 2017 Maria à Porto Rico et Harvey au Texas.) Curieusement, le lien vers l’article du 18 novembre 2024 qui en faisait état a disparu. Il s’agissait du travail du site Newtral, le média espagnol de fact-checking qui jusqu’en 2020 recevait des subventions publiques et des contrats publics jusqu’en 2023.

Au niveau des petites gens, bien sûr, les rapaces habituels profitent de la détresse des propriétaires de rez-de-chaussée sinistrés par les inondations et proposent de les racheter pour une bouchée de pain.

Élargissons notre terrain d’investigation au monde entier. Deux catastrophes naturelles illustrent de manière emblématique les remèdes dévastateurs appliqués dans les zones dévastées : le cyclone Katrina à la Nouvelle Orléans en 2005 et le tremblement de terre en Haïti en 2010. Bien que le premier exemple se déroule dans le monde développé, son traitement relève des méthodes néocoloniales utilisées opportunément lors des tragédies du tiers-monde. Preuve s’il en est que la véritable guerre réside non seulement dans l’antagonisme interétatique ou civilisationnel mais aussi (et surtout ?) dans la lutte des classes.

Le modèle est récurrent : réformes néolibérales brutales, militarisation de l’aide, pillage des ressources et néo-missionnariat (les ONG évangéliques ou occidentales imposent leurs agendas).

Le cyclone Katrina de la Nouvelle Orléans (2005)

Le cyclone Katrina a révélé des violences systémiques commises par les autorités, les forces de l’ordre et les acteurs privés, dans un contexte de racisme structurel et de néolibéralisme rapace.

On note un racisme d’État contre les noirs et les pauvres, criminalisés. La Garde nationale, les mercenaires (Blackwater) et la presse traitent ceux qui cherchaient de la nourriture de pillards pour les Noirs et de survivants pour les blancs. Le maire Ray Nagin ordonne aux policiers d’abattre les pillards sans procès, « Shoot to kill ».

Les digues non entretenues par négligence politique inondent les quartiers noirs (Lower 9th Ward). Les bus scolaires qui auraient pu sauver des milliers de personnes ne sont pas utilisés. Des secours sont bloqués. Des volontaires sont empêchés de porter secours par le gouvernement Bush. Le système carcéral temporaire est militarisé, des centres de détention sont improvisés, des survivants noirs sont parqués dans le Convention Center et le Superdome sans eau ni nourriture, sous surveillance armée. Au final, on se rend compte qu’il s’agit d’une véritable stratégie de nettoyage ethnique : la Nouvelle-Orléans passe de 67 % de Noirs avant 2005 à 59 % après la gentrification forcée.

Le capitalisme du désastre et sa privatisation massive fonctionnent alors à plein régime. Le HUD (Department of Housing and Urban Development, agence fédérale qui a pour objectif principal d’améliorer l’accès au logement, de lutter contre les discriminations) refuse de reconstruire les 5 000 logements sociaux détruits après Katrina, expulsant des milliers de familles noires, pour construire des résidences de luxe. La quasi-totalité des écoles publiques sont remplacées par des charters School à but lucratif. On note l’exploitation d’une main d’œuvre de sans-abris et de déplacés payés 1$/heure pour nettoyer les décombres, sous couvert de travail communautaire.

Enfin des entreprises comme Halliburton (liée à Dick Cheney) et sa filiale KBR (infrastructures de l’énergie et de la logistique), Bechtel et Fluor (construction), Blackwater (mercenariat) empochérent des milliards en contrats frauduleux sans appel d’offres, dans le cadre d’une procédure d’urgence légale mais avec une application délictueuse : dépassements de budgets, facturations abusives et travaux mal exécutés. Un rapport du Congrès en 2006 estime qu’au moins 2 milliards (de dollars) des fonds alloués à la reconstruction ont été gaspillés ou détournés.

Le tremblement de terre de Haïti (2010)

Nous retrouvons un schéma similaire lors de la catastrophe d’Haïti, avec comme ossature institutionnelle une aide militarisée : la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH), déjà présente avant le séisme, est accusée de prioriser la sécurité plutôt que l’aide humanitaire réelle. De plus, la MINUSTAH est ensuite impliquée dans l’introduction du choléra en 2010 (via des casques bleus népalais), épidémie qui tue plus de 10 000 Haïtiens. L’ONU ne reconnaît sa responsabilité qu’en 2016, après des années de déni. Des troupes étrangères, notamment américaines, prennent le contrôle de l’aéroport de Port-au-Prince, retardant parfois l’arrivée de secours médicaux urgents.

Le capitalisme du désastre reprend du service avec des projets de reconstruction qui profitent à des multinationales (comme Monsanto, qui tente d’imposer des semences OGM) plutôt qu’à l’agriculture paysanne haïtienne. Une privatisation et un accaparement des terres, avec, sous prétexte de reconstruction, des zones expropriées pour des projets touristiques ou économiques au profit d’investisseurs étrangers. Bill Clinton, alors envoyé spécial de l’ONU pour Haïti, promeut des zones franches (comme Caracol) où les salaires sont misérables, renforçant la dépendance économique. Pour sa reconstruction le pays ne connaît jamais de véritable souveraineté, les décisions étant prises par des acteurs étrangers (États-Unis, ONU, Banque mondiale).

Le néocolonialisme est clairement identifiable. Une partie des fonds promis (des milliards de dollars) n’a jamais atteint Haïti ou a été détournée vers des entreprises étrangères. Les ONG étrangères ont souvent agi sans coordination avec l’État haïtien, affaiblissant davantage les institutions locales. Des casques bleus et travailleurs humanitaires sont accusés de viols et d’exploitation sexuelle, y compris contre des mineurs, dans des camps de déplacés. Une enquête d’Associated Press (2017) révèle que plus de 100 enfants nés de viols par des soldats de l’ONU sont abandonnés sans soutien. Enfin, la répression politique s’exerce contre des militants haïtiens critiquant l’occupation étrangère ou exigeant des comptes.

Toujours plus d’exemples

Tsunami en Asie du Sud-Est (2004) – Pillage et reconstruction capitaliste au Sri Lanka et en Indonésie : des villages côtiers ont été déplacés au profit de projets hôteliers internationaux ; l’aide américaine (USAID) et européenne renforce la présence militaire occidentale dans la région ; dette « humanitaire » : des pays comme l’Indonésie sont contraints à des prêts du FMI pour la reconstruction.

Cyclone Nargis (Birmanie, 2008) – Sanctions et ingérence politique : blocus « humanitaire » : les États-Unis et l’UE utilisent l’aide comme arme politique contre la junte, retardant les secours ; Médecins Sans Frontières accusée d’espionnage, alors que des milliers de personnes meurent.

Tremblement de terre au Népal (2015) – Colonialisme humanitaire : corruption des ONG avec le détournement de millions de dollars, des maisons non reconstruites après 5 ans ; amateurisme humanitaire : des volontaires étrangers non formés aggravent la désorganisation locale ; des missionnaires chrétiens profitent de la vulnérabilité des survivants pour faire du prosélytisme et provoquer des conversions religieuses.

Ouragan Maria (Porto Rico, 2017) – Colonialisme américain : La FEMA (Federal Emergency Management Agency) étasunienne est reconnue coupable de retards criminels dans l’aide et d’une distribution de nourriture avariée ; contrats attribués à des entreprises américaines avec pour résultat la corruption habituelle faite d’opacité, de surfacturation et d’inefficacité : Whitefish Energy, Fluor, Cobra Acquisitions, PowerSecure, McKinsey & Company, Bronze Star LLC.

Cyclone Idai (Mozambique, 2019) – Exploitation des ressources de la part de Total et d’Exxon dont l’aide est conditionnée à des concessions pétrolières dans le canal du Mozambique ; mesures d’austérité imposées par le FMI malgré la catastrophe.

Et Valence dans tout cela ?

La deadline de l’Agenda 2030

Nous avons vu au début de cette enquête comment les modifications hydrographiques qui furent fatales à la ville ont été générées dans l’esprit de l’Agenda 2030 des Objectifs de Développement Durable (ODD) de l’ONU (et des élites globalistes). Cette idéologie mondialiste influence aussi la transformation de la conurbation elle-même, engagement de longue date avec pour modèle la « ville du quart d’heure ». Le projet de régénération du quartier Vara de Quart, par exemple, s’inscrit explicitement dans cette logique : gentrification, logements sociaux détruits au profit de résidences « éco-responsables »… financièrement inaccessibles pour beaucoup, ce qui provoque l’élimination des quartiers populaires sous prétexte de « relocalisation stratégique », chassant les classes modestes vers la périphérie. Reconversion d’anciennes infrastructures industrielles, développement de voies cyclables, des zones piétonnes et des zones de basse émission, ce qui limite la liberté de déplacement de nombreux conducteurs, transports décarbonés, mixité fonctionnelle (logements-commerces-bureaux) qui fragilise les petits commerces locaux au profit des grandes enseignes, tout cela est au cœur de la stratégie municipale pour 2030. Cet arrière-plan idéologique participe également à la reconstruction post-inondations.

La catastrophe ne remet pas en cause les grandes orientations de la ville, mais semble au contraire servir de catalyseur pour accélérer la transition vers ce modèle urbain déjà promu avant la crise. Les fonds alloués à la reconstruction proviennent en partie de programmes européens (FEDER, Pacte Vert) ou d’ONG internationales (C40 Cities, ONU-Habitat), qui imposent des critères idéologiques (neutralité carbone, inclusion forcée, etc.). Les discours officiels et les annonces de financements publics massifs sont l’occasion de réaffirmer l’engagement de Valence à ces professions de foi de durabilité et la résilience, sans débat public approfondi sur les limites ou les contradictions de ce modèle. La démocratie est confisquée, les citoyens exclus des décisions, les projets sont validés en catimini sous couvert d’urgence post-catastrophe, sans consultation réelle des habitants. Les critiques sont étouffées par un discours culpabilisant (« il faut être écoresponsable ») et une médiatisation pro-système. C’est une guerre silencieuse contre la liberté urbaine et Valence en est un nouveau champ de bataille.

L’inondation de Valence de 2024 est l’exemple à jour, moderne et affiné du contrôle social opéré par les élites mondiales dans le cadre d’une catastrophe naturelle. Ces tragédies sont pour elles une opportunité, un levier supplémentaire pour poursuivre à marche forcée leur plan de soumission de notre humanité. Ce qui frappe tout au long de ce dossier c’est la profonde inhumanité de nos maîtres oligarchiques et de leurs sous-traitants, en guerre contre les peuples. Le mépris envers le troupeau au destin modelable à volonté. Avec l’espoir à peine secret qu’au bout du compte, il y ait moins de bouches à nourrir et plus de ressources à se répartir entre gens des hautes sphères, et leurs affidés soucieux des miettes.

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*L’opacité algorithmique reprochée à Palantir fait référence au manque de transparence du fonctionnement de ses algorithmes, notamment en surveillance de masse, prédiction de crimes et prise de décision automatisée, dans des contextes sensibles sans contrôle démocratique.

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