L’homme politique n’est pas un âne… de Buridan
Le doute serait le commencement de la sagesse (Aristote) mais si la seule certitude qu’on a c’est d’être dans le doute (paraphrase du titre d’un livre de Pierre Desproges), on a vite fait, je parle pour moi, de se transformer en âne de Buridan. Cet âne est un paradoxe philosophique ou plutôt un dilemme poussé jusqu’à l’absurde que l’on présente ainsi : un âne se trouve à égale distance entre un seau contenant de l’avoine et un seau contenant de l’eau. Ne pouvant déterminer une raison pour choisir l’une plutôt que l’autre, l’âne reste indécis et finit par mourir de faim. Bon, si j’avais envie de chipoter, je dirais que l’âne finirait par comprendre rapidement qu’il aurait plutôt intérêt à vite boire un coup s’il ne veut pas mourir non de faim mais de soif. D’ailleurs, si l’on veut donner raison à Buridan qui cherche à prouver ainsi par l’absurde que l’homme ne peut être parfaitement rationnel, il sera plus juste de choisir la version de cette petite fable où l’âne doit choisir entre deux auges contenant chacune un picotin (une mesure) d’avoine. Je déconseille de reproduire cette expérience sur un homme politique (par exemple, au hasard, Emmanuel Valls à trois temps, à dix temps, à cent temps. Merci Brel !) qui mange à tous les râteliers, à celui de gauche, à celui de droite, selon le sens du vent. Il faut dire qu’ayant lui-même inventé cette maladie générée par les circonstances du présent et qui rend hémiplégique toute une population, il sait que son seul remède se trouve dans la prise du Pouvoir. Paradoxe dans le paradoxe puisque ces termes de gauche et de droite sont nés le 28 août 1789 quand il se fut agi de voter pour limiter ou non le droit de veto du roi, c’est-à-dire de limiter son pouvoir, purement et simplement. Ceux qui étaient pour se sont assis à gauche et ceux qui étaient contre furent bien obligés de s’asseoir à droite (même si je ne sais pas qui c’est qu’a commencé). Des réactionnaires ont même fait courir la légende que ces termes avaient été inventés lors du vote sur la condamnation à mort du roi. On comprend leur intérêt, à ces réactionnaires : faire passer la gauche pour une bande de factieux régicides, homicides, tout simplement une bande de criminels se repaissant de sang. Si cela avait été bien le cas, cela rendrait encore plus paradoxal le fait pour un homme dit de gauche de se présenter à une élection présidentielle sous la Ve République. Ou alors c’est qu’il n’y a pas de gauche. Car être de gauche ne peut être, à mon avis, que synonyme de remise en question du Pouvoir. D’ailleurs, je pense que si de Gaulle et ses putschistes ont décidé de faire leur coup d’État le 13 mai 1958, c’est principalement parce que l’instabilité de la IVe République remettait en cause la légitimité du Pouvoir politique lui-même dans ses fondations. Le Pouvoir a besoin d’être incarné, se faire homme (parfois, rarement femme). Il fallait ressusciter les deux corps du roi. Ces deux corps que la gauche avait décapité ! Les élections législatives de 1958 décapitèrent la gauche et surtout le Parti communiste… La dissolution par Macron de l’Assemblée nationale en 2024 est la farce du 13 mai 1958. Une République qui est née par un coup d’État ne peut perdurer que par le coup d’État. On ne se défait pas du péché originel. Farce comme le disait Marx à propos du 18 Brumaire de celui qui allait devenir Napoléon III. « Hegel fait quelque part cette remarque que tous les grands événements et personnages historiques se répètent pour ainsi dire deux fois. Il a oublié d’ajouter : la première fois comme tragédie, la seconde fois comme farce Causidière pour Danton, Louis Blanc pour Robespierre, la Montagne de 1848 à 1851 pour la Montagne de 1793 à 1795, le neveu pour l’oncle. Et nous constatons la même caricature dans les circonstances où parut la deuxième édition du 18 Brumaire. » La première édition fut réalisée par Napoléon Bonaparte. Farce vient de… farce. La farce comique utilise la farce de la dinde à Noël. On pourrait dire ainsi que Macron s’est farci d’un hachis de de Gaulle-Bonaparte pour imiter Louis-Napoléon et plagier Louis XIV : « Le Pouvoir, c’est moi. ». Même si après le bourre-pif dans l’avion, on a plutôt l’impression que c’est Brigitte qui porte culotte. Toute allusion à des affaires récentes d’un dénommé Jean-Michel ne serait que pure coïncidence, et vous savez bien que l’histoire fourmille de rumeurs, de méchancetés, d’ordures déversées sur les Puissants par les jaloux qui en bas croupissent dans leur marécage. Tenez ! C’est ce genre de malfaisant qui ont répandu cette légende urbaine qui attribuait au Roi Soleil un préposé à goûter son caca. Les mêmes qui disent qu’Emmanuel est un michto et que la sienne de langue met bien le scrotum des boss de Blackrock, de McKinsey et de tout le CAC(a) 40.
Brigitte incarne le corps immortel du royaume
Mais, moi, je vous le dis solennellement : depuis de Gaulle, après Mitterrand, après Chirac, l’un des deux corps du Roi avait disparu. « Parce qu’il est naturellement un homme mortel, le roi souffre, doute, se trompe parfois : il n’est ni infaillible, ni intouchable, et en aucune manière l’ombre de Dieu sur Terre comme le souverain peut l’être en régime théocratique. Mais dans ce corps mortel du roi vient se loger le corps immortel du royaume que le roi transmet à son successeur. »1Emmanuel souffre, doute (un peu peut-être parfois), Emmanuel se croit infaillible et démontre ainsi qu’il l’est (je ne vais pas expliquer mes paradoxes), le poing dans sa gueule prouve qu’il n’est pas intouchable et oui !, dans son corps mortel vient se loger parfois celui de Brigitte qui incarne le corps immortel du royaume grâce à l’éternel féminin (français !) qu’elle personnifie à la perfection :
« On ne connaissait pas Brigitte Macron, autrement que par son élégance filiforme estampillée LVMH. » Libération, décembre 2025.
« Avec ses silhouettes modernes et ses combos intemporels, Brigitte Macron incarne le chic à la française. » Gala.fr, mars 2025.
« Brigitte Macron fait de nouveau sensation dans une tenue signature, au zénith du raffinement et de l’élégance. » Femme Actuelle, mai 2025.
« La Première dame, incontestablement la figure française la plus élégante de cette semaine de la mode, a incarné une fois encore le raffinement audacieux. » Vogue France, octobre 2024.
« Incarnant l’élégance à la française et le chic sous toutes ses coutures, la Première dame de France est devenue au fil du temps une référence du raffinement. » Biba Magazine, octobre 2025.
« Celle qui éprouve un attrait particulier pour Louis Vuitton semble avoir plus d’un tour dans sa garde-robe, ce qui lui vaut le surnom de « première dame du chic ». » Marie Claire, 2025.
« Ce look, facile à copier, a séduit par son équilibre entre chic et simplicité. La Première dame a une fois de plus prouvé qu’elle savait allier confort et style. » Au Féminin, 2024.
« À 72 ans, Brigitte Macron est surnommée par certains “la première dame du chic”, pour les tenues élégantes qu’elle arbore sur son corps svelte. » France Inter, décembre 2025.
« Brigitte Macron, véritable icône de style, a fait sensation […] Vêtue d’une robe blanche en dentelle sophistiquée et d’un trench élégant, elle a sublimé sa silhouette avec une allure à la fois chic et décontractée. » Brandibay, 2024
Ça vous la coupe, hein ! Et j’en ai coupé des citations.
Oui, Brigitte-LVMH et Emmanuel-Bernard Arnault restituent cet absolutisme du pouvoir qui fait encore la grandeur de la France, celui grâce auquel se pressent des millions de touristes aux portes du Palais de Versailles ; et s’il est moins visité que la Tour Eiffel et Notre-Dame-de-Paris, c’est, à n’en pas douter, à cause de la CGT RATP SNCF qui traîne des rails pour emmener le monde jusqu’à la Ville Royale. Brigitte et Emmanuel disent à leurs ministres, à leurs députés, aux partis zombies que sont le PS et les LR, à tous ceux qui vont à la gamelle depuis plus de huit ans, qu’ils devront boire le calice jusqu’à la lie s’ils veulent garder une petite place au/à côté des reine et roi soleil. La vieille légende des goûteurs de caca est à deux périnées de devenir réalité.
Il faudrait peut-être que je revienne à mes moutons, à mon âne plutôt. Fi du choix qu’il y aurait à faire ! Emmanuel, en âne philosophique, a bien compris que la résolution du dilemme se trouvait dans la négation dialectique de ce choix absurde. Grâce à son fameux « en même temps », grâce aux deux corps du roi, Emmanuel et Brigitte, dont l’un peut manger à gauche quand l’autre boit à droite. Nous avons deux grands timoniers à la barre, et nous faisons les fines bouches. Honte sur nous et les Dix Plaies d’Égypte !
1 Patrick Boucheron, « « Les Deux Corps du roi » d’Ernst Kantorowicz », L’Histoire, no 315 – décembre 2006


